Récit de pratique cérémonielle ou cultuelle
Tradition: Christianisme
Appartenance: Catholicisme (rite latin)
Communauté religieuse: Soeurs de la Charité d'Ottawa
Classé sous Pratique religieuse (9300), Pratique rituelle (9320), Rite de sacralisation (9326).
Mère Élisabeth Bruyère, fondatrice des Soeurs de la Charité d'Ottawa
© IPIR 2011, soumis à copyright
Mère Élisabeth Bruyère, fondatrice de la Congrégation des Sœurs de la Charité d’Ottawa, est décédée le 5 avril 1876 à l’âge de 58 ans. Personnalité importante de la Congrégation et de la ville, son corps a été inhumé dans le caveau de la Basilique-Cathédrale Notre-Dame d’Ottawa. Puis, trois ans plus tard, Monseigneur Thomas Duhamel, archevêque d’Ottawa, achète un vaste terrain pour en faire un cimetière catholique. Il en donne un large lot à la Congrégation des Sœurs de la Charité. En 1879, le corps de Mère Bruyère est exhumé pour être transféré dans ce lot au cimetière Notre-Dame d’Ottawa.
En 1966, soit 90 ans après son décès, son corps est déposé dans un tombeau à la maison mère. Au début de cette année-là, Mère Saint-Paul, alors supérieure générale, procédait à la visite officielle des couvents de la Congrégation en Louisiane, aux États-Unis. Un matin, en se préparant à aller à la chapelle, elle reçoit subitement l’inspiration suivante : « il faut exhumer, cette année, les restes de Mère Bruyère et les ramener à la maison mère. » Elle réunit alors le Conseil général composé de quatre assistantes pour discuter de ce projet.
Le tombeau de Mère Bruyère
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Plusieurs démarches doivent être effectuées pour procéder à
l’exhumation des restes. Les Sœurs de la Charité d’Ottawa ont consulté
l’archevêque d’Ottawa, Monseigneur Marie-Joseph Lemieux. Il endosse le projet
et suggère d’adresser une demande au Cardinal de la Sacrée Congrégation des
Religieux à Rome. Les autorisations des représentants de la ville d’Ottawa, du
médecin en chef du Ottawa Public Health, de l’administrateur du Cimetière
Notre-Dame d’Ottawa et de la compagnie funéraire sont également requises.
Ensuite, il faut localiser le lieu d’inhumation. Les
précisions consignées dans les chroniques du 30 avril 1879, conservées à la
maison mère, coïncident avec les détails notés à la même date dans les
registres confiés au prêtre, gardien du cimetière. Mère Bruyère se trouvait au
pied de la croix dominant le lot de la Congrégation, vis-à-vis l’inscription
gravée à son nom.
Le 14 mars 1966, les membres du Conseil général, le
représentant de la santé, le gérant de la compagnie funéraire et les fossoyeurs
se rendent au cimetière. Les fossoyeurs amorcent le creusage. Tous les os sont là et intacts. On y trouve des morceaux de bois de la tombe et du tissu
de la robe qu’elle portait. Tous les ossements et les morceaux de bois et de
tissus sont acheminés à la maison funéraire. Ces restes sont déposés dans un cercueil de cuivre. Le voile de Mère
Élisabeth Bruyère, rougi par la terre, était en bonne condition. Il est
conservé au site historique des Sœurs de la Charité d’Ottawa.
Le 5 avril 1966, 90 ans après son décès, c’est au son des
cloches de la Basilique-Cathédrale Notre-Dame d’Ottawa, comme au premier jour
de son arrivée à Bytown en 1845, que les restes de Mère Bruyère entrent à la maison
mère. Le cercueil est déposé dans l’entrée, où sont placés en demi-cercle les
membres du clergé, deux évêques et deux aumôniers de la maison mère, des
invités, une vingtaine de personnes appartenant à la famille Bruyère et des sœurs
de la Congrégation. Une chorale de 200 religieuses, positionnée dans l’escalier
qui conduit à la chapelle, entonne « Je crois que mon Rédempteur est vivant.»
Une couronne de roses blanches et de lys est déposée sur le cercueil. Le cercueil est déposé dans un tombeau de marbre dans un oratoire
prévu à cet effet.
Ce retour des restes de Mère Bruyère à la maison mère a fait
naître l’espoir de la faire connaître davantage auprès de la population et de l’Église. En
1976, lors des célébrations soulignant le 100e anniversaire de son décès,
l’Église, représentée par Monseigneur Angelo Palmas, délégué apostolique au
Canada, a d’ailleurs suggéré à la Congrégation d’entreprendre des démarches de
béatification.
Les procédures en vue de la béatification de Mère Bruyère ont
alors débuté. Il faut d’abord rassembler tous ses écrits, soit 1608 lettres
écrites de sa main, auxquels s’ajoutent celles qu’elle a reçues. Il faut
également récupérer les documents faisant mention de Mère Bruyère et les autres
écrits destinés à sa Congrégation, comme les recommandations ou les règlements
d’une œuvre.
Ensuite, cette abondance de documents est organisée en dossier, sous la
direction d’un postulateur. Ce dernier fait le lien entre Rome et la Congrégation. En février 1978, la demande officielle,
sanctionnée par l’archevêque d’Ottawa est acheminée à Rome. Depuis, différentes
étapes ont été effectuées à cet égard. En 2011, il ne manque qu’un miracle, par
exemple une guérison que la science ne peut pas expliquer, pour que l’Église
accorde les honneurs de la béatification de Mère Bruyère.
Lors de l’exhumation des restes de Mère Bruyère en 1966,
dans un geste de piété filiale, la Congrégation a demandé de recueillir une quantité
de terre du fond de la fosse, terre qui a touché les restes pendant 87 ans. Un
coffret de terre, bien scellé, est conservé dans une chambre forte à la maison
mère. Pour marquer le 150e anniversaire de fondation de la Congrégation, avec l’approbation du postulateur, le
processus de fabrication de reliques secondaires débute.
D’abord, des analyses scientifiques ont pour objectif de prouver l’authenticité
de la terre. Celles-ci se déroulent en trois étapes, le tamisage de la terre,
l’analyse des objets trouvés et le rapport final des analyses confrontées aux
coutumes de la Congrégation. Mère Agathe Gratton, vice-postulatrice et directrice du Centre de la
Cause d’Élisabeth Bruyère, amorce les démarches auprès de l’Institut Canadien de
la Conservation.
L’opération du tamisage s’est déroulée en présence de
témoins. Cela a permis de prélever du bois du cercueil, des parcelles de tissu,
du fil, des agrafes, des épingles et des petits osselets, dont cinq dents. Dans
son rapport, Jerry Cybulski, conservateur d’anthropologie physique,
confirme l’authenticité des restes de Mère Bruyère: « De mon analyse des restes
humains pris dans la boîte de terre, je n’ai pas de raison de croire à la
présence ou à la représentation de plus d’une personne parmi les différentes
parties du squelette. Le développement des fragments d’os et des dents cadre
bien avec l’âge, à la mort, d’une personne de l’âge de Mère Bruyère quand elle
est morte. Pareillement, la grosseur des dents est compatible avec celle des dents
d’une femme.»
Aucune relique de première classe n’est autorisée pour les
personnes n’ayant pas été béatifiées. Les reliques de première classe sont
constituées de tout ce qui fait partie du corps : os, cheveux et parcelles
de chair. Seules les reliques de deuxième classe sont permises. Il s’agit des
vêtements, des parcelles de bois du tombeau ou, dans le cas actuel, de la terre
ayant touché le corps de Mère Bruyère. Des reliques ont été fabriquées à partir
de la terre tamisée. Plus tard, pour faciliter la confection, on a procédé en
utilisant des morceaux de rubans ayant touché les parcelles d'os de Mère Bruyère.
Relique de seconde classe de Mère Élisabeth Bruyère
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Depuis 1966, les religieuses se recueillent auprès des restes vénérés. Pour les sœurs, ce retour est l’occasion d’un renouveau dans la foi, dans l’amour de leur bien-aimée Mère, dans l’attachement à la Congrégation qu’elle a fondée.
Lors du décès de Mère Bruyère, à la demande des sœurs et avec l’approbation de l’évêque, des médecins ont prélevé le cœur de Mère Bruyère. Jusqu’en 1970, ce cœur de chair est conservé dans une urne de verre, comme objet de vénération. En janvier 1970, on le dépose dans une urne de marbre déposée sur le tombeau.
La connaissance de Mère Bruyère et la foi en sa puissance d’intercession se transmettent aux familles, aux élèves, aux patients des hôpitaux et à toutes les personnes en contact direct avec les sœurs. Les religieuses conduisent à son tombeau, comme en un lieu de pèlerinage, parents, amis, visiteurs, malades et étudiants. Ceux-ci conservent une image, une supplique ou une brochure au sujet de Mère Bruyère. Les croyants lui attribuent de multiples faveurs tant matérielles que spirituelles : vente de maisons, aide financière, conversion d’un proche ou succès d’une intervention chirurgicale. Les gens s’adressent au Centre de la Cause d’Élisabeth Bruyère pour confier leurs intentions ou pour témoigner d’une faveur reçue. Le Pape Jean-Paul II et Mère Teresa ont tous deux prié au tombeau de Mère Bruyère. Ainsi grandit de jour en jour la dévotion populaire envers celle qui a mis sur pied plusieurs œuvres sociales dans la région de l’Outaouais.
La Congrégation dispose de plusieurs écrits susceptibles d’intéresser les gens de tous les âges. Une bande dessinée résume les moments marquants de la vie de Mère Élisabeth Bruyère et de la fondation de la Congrégation. Une biographie, intitulée Mère Élisabeth Bruyère, fondatrice des Sœurs de la Charité d’Ottawa, a été rédigée par Émilien Lamirande. De plus, 226 lettres de Mère Bruyère sont publiées en trois volumes sous le titre Lettres de Mère Élisabeth Bruyère, colligées par Sœur Jeanne d’Arc Lortie s.c.o. À ces volumes s’ajoute un périodique, Échos du Centre de la Cause d’Élisabeth Bruyère, publication bilingue qui paraît trois fois l’an, dont le tirage en 2011 est de 2 800 exemplaires expédiés à travers le monde.
Municipalité: Ottawa
Lieu:
Maison mère des Soeurs de la Charité d'Ottawa, 9, rue Bruyère, Ottawa, K1N 5C9
Téléphone: 613-241-2710
Télécopieur: 613-241-5509
Site Web: http://www.soeursdelachariteottawa.com/Francais/home-francais.html
Soeur Huguette Bordeleau
Titre, rôle et fonction : Elle a exercé les fonctions d'enseignante et d'archiviste.
Lien avec la pratique : Sœur Huguette Bordeleau est directrice du Centre de la Cause d’Élisabeth Bruyère.
Enquêteurs : Francesca Désilets , Anne-Florence Bisson
Date d'entrevue : 9 décembre 2011
La réalisation de l’Inventaire du patrimoine immatériel religieux a été rendue possible grâce à l’appui de six partenaires: